Mud

Alors qu'on attendait beaucoup de Take shelter, on attendait beaucoup moins de Mud. Si son précédent film apocalypto-schizophrène était au final plutôt décevant malgré un sujet alléchant, Jeff Nichols semble avoir cette fois voulu se mouler dans l'autofiction américaine, convoquant à l'occasion Mark Twain et tous les codes du récit initiatique.

Nous sommes donc en terrain connu. Le film suit Ellis et son ami Neck dans ce qui deviendra un épisode marquant de leur vie, un passage formateur qui les changera à jamais. Mud mêle alors récit d'aventure au bord d'un fleuve, destins brisés et découverte de l'amour, avec tout ce que cela suppose d'enthousiasmes et de désillusions.

Le parti pris est délibérément classique, mais Nichols assume. L'histoire est entendue mais habilement menée, le scénario bien construit et les clichés pour la plupart évités. La dynamique du film est donnée, non pas par le personnage énigmatique de Mud, mais par celui d'Ellis, adolescent confiant, courageux et curieux, d'emblée attachant. Nous sommes avec lui dès les premières images. Il est notre guide, notre œil, notre double. Nous sommes Ellis. Nous rêvons de l'être.

La mise en scène suit la même ligne. Claire, fluide et discrète, elle accompagne l'histoire sans en rajouter. Peut-être un peu trop de musique, peut-être un peu trop d'images "typiques", mais peu importe. L'ensemble fonctionne. On nous raconte une histoire, on y croit, et c'est tout. Le film se suit donc avec intérêt, même si l'on déplore une nette baisse de rythme dans la seconde partie, un bon quart d'heure de trop, inconfort bientôt effacé par un final plutôt efficace.

On apprécie également un très bon casting, à commencer par le jeune et très convainquant Tye Sheridan. Matthew McConaughey campe quant à lui un loser classique mais parfaitement crédible. À noter le toujours excellent Michael Shannon et le sympathique Sam Shepard en guise de figure mythique.