Drive

Publié le 9 Octobre 2011

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Comme pour beaucoup de films, le générique de Drive donne le ton. Sur des images urbaines, cadrées, contemporaines, apparaît le lettrage laid et ringard d'une boulangerie "comme autrefois". Mais pourquoi ce rose ?

L'ensemble du film se conjugue donc entre une certaine modernité et une ringardise certaine. Et même si le meilleur l'emporte, on est sans cesse dérangé par l'utilisation parasitaire d'une iconographie "out" qu'on croyait demeurer l'exclusivité de Tony Scott.

Si l'on continue du côté des comparaisons, on ne peut pas ne pas évoquer Tarantino. Grand recycleur des années 60 et 70, le réalisateur américain semble se poser ici comme modèle d'un Nicolas Winding Refn en recycleur de la double décennie 80-90. Sorte de Pulp fiction sous Prozac, Drive installe une ambiance pesante qui enferme ses héros sans leur laisser entrevoir la moindre porte de sortie. Film de gangsters apocalyptique au rythme lent, il illustre parfaitement le moulinage post 11 septembre du film de genre. S'il en respecte tous les codes dans un récit sans originalité (jusque dans la romance naïve mais pas sans charme entre le héros et sa voisine), Drive réussit néanmoins à imposer une atmosphère qui lui est propre.

Prix de la mise en scène à Cannes, le film est en effet plutôt bien réalisé. Souvent sur le fil, fil plusieurs fois franchi (notamment dans d'incessants ralentis dont une bonne moitié de trop), Drive se présente comme un long clip urbain décérébré mais souvent hypnotique, entrecoupé d'assassinats fulgurants. L'ensemble s'enrichit d'une bande son très travaillée et plutôt réussie (jusque dans ses silences), malheureusement gachée par des parties vocales très 80's (et très ratées). Les années 80 ne se contentent d'ailleurs pas du son, mais s'immiscent aussi dans l'image, avec en apothéose cette scène en bord de rivière, déplacée et totalement ridicule (on se demande s'il s'agit d'une publicité pour Centers Parks ou pour une mutuelle).

 

Le problème finalement, c'est peut-être l'histoire qu'on nous raconte. Hyper codifiée et sans intérêt, elle ne parvient jamais à nous captiver. Et quand en fin de compte, les éliminations se succèdent façon dommage collatéraux, on regrette que Scorsese ne soit pas aux commandes.

 

L'interprétation est plutôt bonne dans son ensemble, si ce n'est la molle prestation de Carey Mulligan qui se contente d'être gentille. Ryan Gosling en revanche, au-delà de son sex-appeal dévastateur, compose un personnage beaucoup plus subtil qu'il y paraît. Souvent froid et placide, il sait d'un sourire, d'un regard, ou d'un visage en sueur, apporter de la profondeur à son mystérieux personnage. Notons à ses côtés l'excellent Bryan Cranston (aussi brillant ici que dans Breaking bad).

 

Pour résumer, on peut dire de Drive qu'il se regarde sans déplaisir mais ne casse pas la baraque. On espère seulement qu'on arrivera un jour à se débarrasser de ces maudites années 80... Mais ça, c'est pas gagné.

 

Etoile2

Rédigé par pierreAfeu

Publié dans #Coups moyens

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J
<br /> Je suis d'accord sur deux nuances, à savoir le scénario assez "codifié" et le personnage féminin finalement pauvre en consistance malgré le charme de l'actrice.<br /> <br /> Autrement, tout le reste est pour moi une véritable mine d'or. Sans revenir sur le rapprochement du 11 septembre que je ne comprends moi aussi qu'à moitié, je pense qu'il faut surtout voir ce<br /> 'Drive' comme un objet filmique assez orgasmique qui marie la belle artificialité du cinéma à ses premiers amours testostéronnés (bad guys, flingues, voiture...).<br /> Je trouve ce Winding Refn très intéressant car son cinéma ne cesse d'évoluer tout en gardant une certaine cohérence thématique. D'un point de vue esthétique, pour moi 'Drive' est le résultat d'une<br /> vraie maturation de metteur en scène.<br /> <br /> Après, évidemment c'est une question d'appréciation ! ;) Mais j'aime plus que tout les metteurs en scène qui communiquent leur passion pour le cinéma en garantissant le divertissement autant que la<br /> pertinence cinématographique. Pour moi Refn fait partie de cette veine, et connaissant un peu le bonhomme depuis 'Bleeder' ou 'Pusher' ce n'est pas nouveau.<br /> <br /> <br />
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M
<br /> Moi, j'ai beaucoup aimé ce rose. J'ai juste adoré le générique un peu ringard, kitsch, rétro ...<br /> <br /> <br />
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P
<br /> <br /> Ce n'est pas tant le rose que la police de caractère choisie... qui est au-delà même de la ringardise ! ;-)<br /> <br /> <br /> <br />
P
<br /> alors vivement qu'on voit ça.. c'est marrant ce cycle en fin de compte<br /> <br /> <br />
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P
<br /> Mon cher Pierre, j'attends avec une TRES GRANDE IMPATIENCE ta contribution (j'espère que tu ne t'es pas défilé) sur les inavouables chez Mymp. Tu auras remarqué le tour de force de Mymp avec la<br /> disparition de la lettre "e" pour éviter de parler de son inavouable qu'il m'avait avoué mais que j'ai oublié.... GROSSES BISES A TOUS<br /> <br /> <br />
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P
<br /> <br /> Je ne me suis pas défilé Palilia ! Et je crois être le prochain...<br /> <br /> <br /> <br />
T
<br /> Oh noooonnnn ! J'ai malheureusement concentré mon attention pour défendre le film chez Chris, et j'ai raté une bataille ici ! ;-)<br /> <br /> Bon, bah tant pis, pourtant j'avais lu ton article, mais sans les comms, sinon j'aurai participé...<br /> <br /> Du coup, bah je laisse quand même ça, tant pis : à part les émissions une fois par an de France 2 sur les tubes des années 80, franchement, on en entend pas parler.<br /> <br /> Ensuite on peut pas vraiment parler de nihilisme après le 11 sept, on en parlait fin XIXème, d'accord, au moment de l'effondrement des valeurs métaphysico-religieuses et de la mort de Dieu, mais<br /> maintenant, ça fait un peu réchauffé. Ou alors néo-nihilisme dont il faudrait donner quelques détails.<br /> <br /> Ensuite sur Thatcher et l'inflexion néo-libérale qui nous fout dans la merde : oui évidemment, le néo-libéralisme date de ce moment-là, 81 en France etc, on connaît l'histoire. Mais quand même, il<br /> faut pas oublier, que les vrais responsables du néo-libéralisme, ses penseurs ou ses théoriciens, des Von Hayek (conseiller de Margareth) et consorts ont écrit en réaction à la 2nde GM = en gros,<br /> dans un rapport des totalitarismes au libéralisme. Bon ça fait un peu raccourci de bistrot, évidemment, mais enfin je trouve ça un peu léger de dire que le Mal est arrivé en 80. Peut-être les<br /> années 80 découlent-elles de la Guerre et des plans d'Etats qui la suivent immédiatement, et donc encore avant pour la date du libéralisme... Non ?<br /> <br /> Et M. Jackson alors ? On en fait quoi de Michael ?<br /> <br /> <br />
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P
<br /> <br /> Michael, je m'en fous un peu... ;-)<br /> <br /> <br /> <br />